La coupe du monde de football débutera dans exactement 100 jours. L’occasion de réaliser un point d’avancée sur l’organisation de la compétition par le Brésil.
Le Brésil a eu sept ans pour préparer son Mondial. Mais comme lors d’une finale plus indécise que prévue, l’horloge tourne inexorablement et à 100 jours du grand soir, le pays court toujours après une maitrise de l’organisation de son événement. Car le Brésil n’est pas des plus rassurant avec entre autres :
- un retard sur fin de la construction des stades brésiliens pourtant fixée au 31 décembre 2013 ;
- des aéroports, des routes et des hôtels ne sont toujours pas livrés ;
- des menaces de manifestations pèsent sur la compétition.
Si la présidente Dilma Rousseff – qui joue sa réélection en octobre – a beau marteler comme une incantation que le Brésil va réaliser « la Coupe du monde des Coupes du monde », le doute s’est pourtant installé.
Le dossier des stades est une sacré épine dans le pays du Brésil. Les douze enceintes devaient être livrées au plus tard le 31 décembre 2013, pour que la FIFA puisse y effectuer tous les tests nécessaires. Cinq ne sont pas encore prêtes, à des degrés divers. Celle de Curitiba, très dangereusement hors délai, a frôlée le carton rouge. Elle n’a dû son maintien qu’à l’engagement de la présidente, soucieuse d’éviter un cuisant camouflet.
Ce dossier a d’ailleurs régulièrement jeté de l’huile sur le feu dans les relations entre la FIFA et le Brésil. Même si l’abcès a été crevé, la pression continue d’être exercée du côté de la fédération par la voix de son secrétaire général Jérôme Valcke :
On va à 200 km/h, c’est bien au-delà de la limite de vitesse autorisée, mais ce sera le cas jusqu’au 12 juin.
Autre sujet sensible, la fronde sociale historique qui règne depuis juin 2013 et la coupe des confédérations. Les voix s’élèvent notamment contre la facture publique du Mondial, la misère des services publics et la corruption des élites. Si les manifestations s’essoufflent, elles deviennent de plus en plus violentes.
En effet, les manifestations régulièrement convoquées à Rio de Janeiro et Sao Paulo par la mouvance d’extrême gauche et les anarchistes masqués du Black Bloc dégénèrent régulièrement en violents affrontements. Le 6 février, un caméraman de télévision a ainsi été tué à Rio par une fusée d’artifice allumée par des manifestants. Ces éléments poussent le pays à rassurer sur les moyens mis en place en termes de protection de l’évènement, tant la menace est lancinante sur la sécurité des très nombreux supporters.
En face, la police militaire, mal formée au maintien de l’ordre, conserve des méthodes musclées héritées de la junte. Quelques 150 000 policiers et militaires seront mobilisés. Un dispositif anti-émeutes a été mis en place. Il se dit même que l’armée interviendra si nécessaire…
Du côté de l’opinion publique brésilienne, la population est massivement hostile à ces violences. Ils sont également 80% à assurer qu’ils ne manifesteront pas pendant le Mondial. L’humeur n’en est pas moins à la grogne et au désenchantement, 75 % des brésiliens considérant comme inutiles les dépenses colossales engagées.
L’économie tourne depuis trois ans au ralenti, les prix flambent. Le pourcentage de Brésiliens soutenant la tenue du Mondial dans le pays a chuté de 79% en 2009 à 52% selon un récent sondage. Il faut dire que lors de la candidature du pays à l’organisation de la coupe du monde, il avait été promis que la compétition serait financée à 100% sur fonds privés. Finalement, une grosse partie de l’événement sera financé par fonds publics.
En ce qui concerne l’héritage de la compétition, celle-ci devait laisser en héritage de nouvelles lignes de métro, des tramways. Une grande partie de l’ambitieux plan initial de mobilité urbaine a été purement abandonné en route. Et alors que 3 millions de Brésiliens et 600.000 étrangers vont se déplacer à travers ce pays grand comme 14 fois la France, nous savons déjà que les travaux d’agrandissement de plusieurs aéroports obsolètes et saturés ne seront pas achevés pour le Mondial. Ces retards pour les infrastructures aéroportuaires risquent de causer des retards conséquents.
Pour certains observateurs, le retard du Brésil pour la compétition est principalement d’ordre culturel :
Une des caractéristiques négatives de l’organisation de la Coupe du monde au Brésil, c’est l’improvisation. C’est une question culturelle. On croit que tout peut se faire au dernier moment, sans planification, mais que finalement ce sera un succès grâce à l’hospitalité et la chaleur des Brésiliens – José Carlos Marques, professeur à l’Observatoire du Sport de l’Université Estatal Paulista (UNESP).
Nous sommes donc pour le moment loin de l’ambition affichée il y a sept ans lors de l’obtention de l’organisation du Mondial : le Brésil émergent voulait démontrer qu’il jouait désormais dans la cour des grands et faire taire ceux qui, comme De Gaulle, pensaient que ce n’est « pas un pays sérieux ».
C’est finalement au plan sportif que le quintuple champion du monde s’est le mieux préparé. Le sélectionneur Luiz Felipe Scolari a su redonner cohésion et ambition à une Seleçao dont il avait hérité en plein doute fin 2012. En tant que pays organisateur, le Brésil fait partie des favoris pour remporter la compétition.
A 100 jours du début de la compétition, il reste encore du chemin quant à l’organisation de l’événement. Nous avons toutefois des raisons de penser que la compétition sera à la hauteur de nos espérances. Avec pourquoi pas un exploit des bleus après une finale remake Brésil-France ? Nous nous prenons à rêver à mesure que cette grande fête approche… 🙂
Retrouvez le reportage vidéo de l’AFP à ce sujet :
Mondial 2014 : le chantier s’éternise par lemondefr